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Retour à la listeRéforme infirmière 2025
une avancée majeure pour les compétences et la reconnaissance du métier
Le 5 mai 2025, le Sénat a adopté à l’unanimité la proposition de loi visant à rénover en profondeur le métier infirmier. Portée par la députée Stéphanie Rist et déjà approuvée par l’Assemblée nationale en mars, cette réforme structurelle marque une étape majeure pour la reconnaissance des compétences infirmières.
Elle répond à une attente forte de la profession, dans un contexte de pénurie médicale, de montée en charge des soins de proximité et d’aspiration à une plus grande autonomie dans les pratiques soignantes.
Un cadre législatif modernisé
Le cadre législatif encadrant la profession infirmière n’avait pas connu de réforme majeure depuis 197. Depuis, la pratique a considérablement évolué, notamment avec l’essor des infirmiers en pratique avancée (IPA), la diversification des contextes d’intervention (libéral, EHPAD, école…) et la nécessité d’optimiser les parcours de soins face à la désertification médicale.
La réforme infirmière 2025 redéfinit les missions du rôle propre infirmier, jusque-là encadrées par un décret de 2004 aujourd’hui considéré comme obsolète.
Le Sénat a par ailleurs modifié la proposition de loi afin de favoriser la mise en œuvre rapide du texte et d’apaiser les tensions entre professions.
Ce que change concrètement la réforme infirmière
Reconnaissance du rôle propre infirmier
La loi inscrit désormais dans le Code de la santé publique deux actes majeurs :
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la consultation infirmière
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le diagnostic infirmier
Affirmant ainsi l’autonomie professionnelle des infirmiers
Cette reconnaissance légale valorise le rôle propre des infirmiers dans le parcours de soins.
Élargissement des compétences
Les infirmiers se voient accorder le droit de prescription de certains produits de santé et examens complémentaires, selon une liste définie par arrêté.
De plus, l’accès direct aux infirmiers est élargi, notamment pour les infirmiers en pratique avancée (IPA), permettant une prise en charge plus rapide des patients.
Les sénateurs ont confirmé la pertinence d’un accès direct aux infirmiers pour des soins de premier recours relevant du rôle propre, tout en privilégiant une expérimentation pour l’accès direct dans le rôle prescrit.
Ils ont rappelé que l’exercice infirmier s’effectuait en coordination avec l’ensemble des professionnels de santé.
Cela justifie le pouvoir de prescription des infirmiers, ainsi qu’une contribution à la conciliation médicamenteuse aux côtés des autres professionnels de santé.
Valorisation des spécialités et des missions spécifiques
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La loi reconnaît explicitement les spécialités infirmières telles que :
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les infirmiers en pratique avancée (IPA)
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les infirmiers anesthésistes (IADE)
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les infirmiers de bloc opératoire (IBODE)
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les puéricultrices (IPDE)
Le texte reconnait désormais le statut d’infirmier coordinateur en EHPAD et les infirmiers scolaires comme une spécialité infirmière.
Réactions de la profession : un tournant attendu… mais encore des débats
L’Ordre National des Infirmiers a salué cette réforme comme un « tournant historique » pour la profession.
Les syndicats et associations professionnelles ont exprimé leur satisfaction, soulignant une avancée vers une meilleure reconnaissance.
Cependant, certaines voix, comme celle du Syndicat National des Professionnels Infirmiers (SNPI), ont exprimé des réserves concernant l’effacement du rôle relationnel dans la version sénatoriale du texte.
Implications pour la pratique quotidienne
Cette réforme impacte directement la pratique quotidienne des infirmiers.
Elle renforce leur autonomie professionnelle et leur prise de décision clinique.
Les relations interprofessionnelles, notamment avec les médecins, évolueront vers une collaboration plus étroite.
Enfin, les formations initiales et continues devront s’adapter pour intégrer les nouvelles compétences légales.
Les amendements du Sénat
Les sénateurs ont ajouté plusieurs amendements, dont :
- Un amendement qui prévoit que les futures négociations sur la rémunération prennent en compte la pénibilité de l’exercice infirmier.
Plusieurs voix au Sénat ont effectivement alerté le gouvernement sur les «conditions de travail» des infirmiers, appelant à une revalorisation salariale. - Un amendement qui fixe à 6 ans la durée d’inactivité qui doit donner lieu à une évaluation des compétences pour un infirmier qui souhaiterait de nouveau exercer.« Si l’autorité compétente constate l’insuffisance professionnelle de l’infirmier, elle lui demande d’effectuer, préalablement à toute reprise d’activité, les mesures d’accompagnement ou de formation qu’elle juge adaptées », précise cet amendement.
- Un amendement qui détermine que les infirmiers anesthésistes (IADE), de bloc opératoire (IBODE) et de puériculture (IPDE) peuvent exercer en pratique avancée « selon les modalités propres à leur spécialité définies par décret en Conseil d’État. »
- La reconnaissance du « rôle pivot » des infirmiers de l’Éducation nationale : les Sénateurs ont également érigé au rang de «spécialité infirmière autonome» le corps des infirmiers de l’Éducation nationale et de l’Enseignement supérieur, pour reconnaître le «rôle pivot» de ces professionnels dans le système éducatif et sanitaire et qui « constituent une spécialité infirmière autonome, pouvant être sanctionnée par un diplôme de niveau 7 », soit un Bac+5.
- Les sénateurs ont également inscrit dans le texte une disposition qui cible les EHPAD.
Elle les autorise à intégrer un infirmier coordonnateur « chargé, sous la responsabilité hiérarchique du médecin coordonnateur, d’assurer l’encadrement de l’équipe soignante de l’établissement. ». Ses autres missions et ses qualifications seront, elles, définies par un futur décret.
Prochaines étapes : décrets et négociations conventionnelles
La prochaine étape consiste en une commission mixte paritaire composée de 7 députés et de 7 sénateurs pour harmoniser les versions de l’Assemblée et du Sénat, suivie de la mise en œuvre concrète des dispositions légales par la parution de décrets.
La date de cette réunion reste à fixer
Concernant la rémunération des infirmiers, les sénateurs ont souhaité que la pénibilité du métier soit prise en compte dans le cadre des négociations.
Ils ont renvoyé à la convention des infirmiers libéraux la définition nationale de l’agglomération pour le calcul des indemnités kilométriques.
Enfin, l’ouverture de négociations conventionnelles avant l’été prochain a été confirmée par les syndicats infirmiers libéraux( FNI), afin entre autres, de débattre sur la prise en compte des nouvelles missions issues de la loi infirmière, ainsi que la simplification administrative.
La loi infirmière du 5 mai 2025 représente une avancée significative pour la profession infirmière.
Elle reconnaît et valorise les compétences des infirmiers, tout en adaptant le cadre législatif aux réalités contemporaines.
Il appartient désormais à la profession infirmière de s’approprier ces nouvelles compétences et de participer activement à leur mise en œuvre, afin de renforcer son rôle primordial dans le système de santé français.
Cette reforme arrive à point nommé, juste quelques jours après la journée mondiale des infirmières. Par ailleurs, l’actualité est dense ces derniers jours pour les infirmiers qui, sous certaines conditions, se voient à présent autorisés à rédiger des certificats de décès par décret depuis fin avril 2025.
A propos de l’auteur de cet article :
Brigitte Bax
IDEL
Formatrice Infirmier et aides-soignants
Ingénieure pédagogique